La Nam Ou pour Nong Khiaw... Laos
Par UXAR, lundi 9 octobre 2006 à 22:55 :: Laos :: #39 :: rss
Lundi levé 6H45, il faut être à 8 heures à L’embarcadère.
Une noodle soup dans une échoppe à côté, un touk-touk car il pleut, et on nous indique un bateau large et assez spacieux… Nous embarquons, mais par présence d’esprit nous demandons la destination au pilote. Bien nous en prend, on nous envoie vers l’Ouest à la frontière Thaï…
On file vite fait, notre bateau part dans 5 minutes et on se retrouve dans une embarcation (la bonne cette fois) au raz de l’eau, assis sous la ligne de flottaison, 1 mètre de large, 12 de long, 4 mètres « habitables », 2 bancs à 15 cm du fond de chaque côté dans le sens de la longueur, et déjà 12 personnes dedans…
C’est entassés les uns contre les autres que nous allons passer nos 7/8 heures de trajet aujourd’hui.
Nous partons vers le Nord en naviguant sur le Mékong durant 25 Km, puis nous allons remonter la rivière Nam Ou qui se faufile au travers des montagnes jusqu’au Nord du Laos.
Première étape ce soir, Nong Khiaw, toute petite bourgade de pêcheurs en bordure du cours d’eau.
Le bateau navigue en bordure de rive en permanence sur le Mékong car c’est vraiment un fleuve dangereux.
Il pluvine, nous prenons les embruns, çà promet !... Mais cela se calme très vite. Nuageux, mais pas de pluie.
Impressionnant de naviguer sur ce fleuve au raz de l’eau, et pas de gilet de sauvetage, cela va sans dire…
Le Mékong est bordé tout du long de petits jardins à même les rives, engrais naturel des alluvions et arrosage facile, où poussent salades, haricots, tomates, etc… Toute une vie ancrée ici…
Après 1H30 sur le grand fleuve, nous empruntons la Nam Ou, large cours d’eau (50 à 100 mètres) qui commence (pour nous) entre d’imposantes falaises…
Rivière puissante, marron de sable et de terre, comme le Mékong, gonflée de l’eau de la saison des pluies qui s’achève, et comportant de nombreux rapides. C’est un cours d’eau très dangereux car il y a des tourbillons de tous les côtés durant tout le parcours, de véritables petits Maelströms… Je n’exagère pas, c’est vraiment impressionnant. Et même tout en étant titulaire du permis bateau maritime, je ne m’aventurerais pas à naviguer dans de telles conditions…
Mais là, malgré les dangers que comporte la navigation sur une si frêle embarcation, j’ai confiance et je ris même lors de passages difficile, car le pilote est très bon, et de plus, sa femme et sa fille sont à bord. Donc aucun problème possible.
Et pourtant le bateau se tord parfois dans sa longueur, il souffre, il grince, mais il passe….
Les rives de la Nam Ou sont habitées sporadiquement mais tout du long de son cours.
Nous croisons des centaines de petites pirogues d’un ou deux pêcheurs qui travaillent au milieu du flux, se déplaçant seulement à la rame, de nombreuses plantations sur les berges un peu partout également, des enfants qui jouent dans l’eau, qui glissent sur la boue des rives en guise de toboggan avec éclats de rire… Ils répondent joyeusement aux signes que je leur adresse de la main par des grands « coucous »…
A chaque sourire ou salut que j’envoie aux pêcheurs, les visages se délient et s’illuminent de sourire radieux. Des gens simples, des vies simples, mais des vies heureuses… (à priori…)
Au fur et à mesure de kilomètres d’eau, les costumes commencent à changer… Ce ne sont plus les tee-shirts et les casquettes mais des vêtements plus traditionnels, ainsi que l’apparition de sortes de coiffes ou de foulards chez les femmes.
2 arrêts « pipi » au bord de la rivière, sans lieux vraiment pour être tranquille pour les femmes, une fois de plus. Juste de quoi s’enfoncer un peu dans la jungle sur quelques mètres.
La région est montagneuse, très vallonnée, très verte et d’une végétation très dense. C’est toujours aussi magnifique.
Et une fois de plus il valait mieux prévoir de quoi manger…
Le plus dur, c’est pour les jambes…
La position accroupie, sans pouvoir allonger les jambes ni pouvoir se lever est très difficile… Il y a un toit sommaire en tôle 30 cm au dessus de nos têtes, et de toute façon le bateau est équilibré avec 7 personnes de chaque côté et à chaque mouvement le bateau penche dangereusement, surtout dans les rapides… Pas question de bouger !
Les jambes s’ankylosent, sont lourdes, les « fourmis » apparaissent, et ce, seulement après 2 heures de parcours. Nous en sommes à 7H15 de trajet, abrutis par le ronronnement régulier du moteur à l’arrière, tout proche.
Et il pleut depuis ½ heure, un coup de mousson bien forte.
D’un côté du bateau il y a une bâche, ou du moins ce qu’il en reste, mais du mien il n’existe plus rien depuis fort longtemps… C’est donc cape de pluie, chapeau et tâcher de s’abriter au maximum pour éviter de devenir une éponge, tout comme les sacs…
L’ambiance est étrange, chacun accepte son sort, ses voisins, ses compagnons de route d’infortune, les uns discutant avec les autres, échangeant complicité et rires au regard de la situation. Les jambes, les sacs, tout est un enchevêtrement, mais comme il ne peut en être autrement tout se passe très bien.
Nos voisines de « bancs » sont deux Hongroises que nous avions rencontrées dans le bus pour Vang Vieng, puis dans celui pour Luang Prabang, nous les avions croisées 3 fois hier et le hasard fait que nous voyagions une fois de plus ensemble…
Nous avons tous hâte d’arriver à Nong Khiaw… Les rires se font nerveux, la fatigue est palpable…
Je me pose une question : A quoi sert l’argent que gagne la compagnie de bateaux ?...
10 $ par personne pour Nong Khiaw, alors que c’est 8 $ en bus et plus rapide. Mais comme c’est un monopole fluvial et que cela plait aux voyageurs, les tarifs sont très chers alors que le bateau est un moyen de transport économique. Donc 14 passagers à 10 $ cela fait 140 $ et c’est une fortune ici (environ un salaire mensuel en campagne). Un vieux bateau, qui ne coûte presque rien, 14 litres de gasoil au navire / pompe à essence au départ, c'est-à-dire 10 $,
le salaire du pilote, 2 ou 3 $ par jour je suppose, un embarcadère qui n’existe pas (c’est la rive en terre du Mékong), et une guérite pour la vente des billets en pire état qu’une vielle cabane de jardin… Alors au pire 30 $ dépensés, mais où vont les 110 autres ? Même pas une bâche contre la pluie investie (genre 3 $)… Je suppose qu’il y a du « sucrage » quelque part… Et c’est dommage que ce ne soit pas le pilote ou les autres ouvriers qui en bénéficient…
La question reste donc en suspend… A méditer…
Bientôt 8 heures de trajet et toujours rien à l’horizon…
C’est la rivière infinie… Le paysage paraît être toujours le même sous la pluie. Les mêmes rapides, les mêmes pêcheurs (qui travaillent toujours malgré le temps), les mêmes…. Tiens, une pirogue nous interpelle depuis l’autre côté de la Nam Ou… Et comme je le suppose, nous embarquons deux « bato-stoppeurs » Lao que nous emmenons à la ville. Allez, un peu plus de charge… Je ne connais pas la capacité maximale en poids de notre embarcation mais je pense qu’elle déjà largement dépassée… Mais bon, elle flotte toujours…
Et il flotte toujours… Vivement Nong Khiaw…
Bien nous a pris de ne pas prendre les ordinateurs car les sacs sont bien humides après ce périple…
8H45 de voyage, nous apercevons enfin le seul pont qui traverse la Nam Ou, nous arrivons donc à notre étape…
Il pleut toujours… Un escalier sur la rive et nous abordons dans un village. Il y a désormais l’électricité ici, tant mieux car il commence à faire nuit.
Quelques échoppes le long de la rue principale et nous allons directement à la Guesthouse que nous avons repérée (Chittawong Guesthouse).
Bungalows à 3 $, toilettes à l’extérieur, un peu loin, ou 8 $ avec salle de bain dedans. Un peu cher, mais d’autres touristes du même bateau arrivent derrière nous, donc plutôt que de risquer à devoir errer dans Nong Khiaw by night à la recherche d’un autre hôtel, j’accepte la chambre pour ce soir. 9 heures de navigation précaire çà suffit, envie de prendre une douche, de sécher les affaires et d’aller manger.
Le bungalow est sympa, grand, moustiquaire, douche chaude et une belle terrasse donnant sur la Nam Ou.
Nous lavons quelques vêtements pour anticiper sur les jours à venir car avec l’humidité ambiante le linge est long à sécher…
Pour dîner, peu de choix, 3 petits restos regroupés sur le carrefour central de Nong Khiaw à l’entrée du pont. Tous les « farangs » se sont réunis dans un resto Indien (on se demande bien ce qu’il fait là d’ailleurs, dans ce village perdu…) car cela représente certainement une « sécurité » de repas pour eux. Nous même allons du coup dans un petit resto Lao, personne, très bon accueil de la famille, fried noodles et œufs pochés. Très bon et copieux. 1 $ chacun.
Crevés, à 21 heures nous éteignons la lumière et tombons dans les bras de la Morphée Lao bercés par le bruit caractéristique de la forêt tropicale, « grillons et cigales », et par le chant continu de la Nam Ou…
Au matin, réveillés tôt par la lumière du jour, nous retournons dans notre petit resto de la veille, soupe de nouilles et scrambled eggs (œufs brouillés), salade de fruits, café Lao et jus d’orange frais. Bien callés pour la journée…
Nous nous promenons dans le village, c’est vraiment très petit et nous découvrons la vie locale. Le rythme est lent, on a l’impression que les gens ne font rien… Les enfants jouent, sourient, les adultes parlent entre eux et attendent…
La gare routiere...
La station essence...
Le paradoxe dans un patelin pauvre comme celui-ci, c’est le nombre de motos ainsi surtout que le nombre de paraboles pour TV-satellite…
Tant mieux pour eux s’ils ont désormais accès à la « technologie »… Même mon téléphone portable capte le réseau… Cela me permet de donner des nouvelles à Yonnah et à la famille…
Nous en profitons pour prendre des informations pour la suite de notre voyage. Pas de bus direct pour le Nord, il faut repasser par l’intérieur du pays. Donc notre seule solution logique est de reprendre le bateau pour continuer notre périple. Et il reste beaucoup de trajet sur la Nam Ou…
Demain matin, bateau pour Muang Ngoi Neua, 1 à 2 heures de navigation mais impossible d’avoir la correspondance pour Muang Khua le même jour, donc nous y ferons étape au soir. C’est un village qui est un marché régional.
Le surlendemain ce sera entre 5 et 7 heures de bateau et encore un tronçon de 7 à 8 heures le jour d’après pour Phongsali, capitale de district tout au Nord du Laos, enserrée entre la Chine et le Vietnam. D’ici là, que d’eau à voir…
Nous sommes allés visiter à 3 Km à pied au travers de la campagne
une grotte où les habitants de la région s’étaient réfugiés durant tous les bombardements américains lors de la guerre du Vietnam (deuxième guerre d’Indochine).
Difficile d’imaginer des milliers de personnes vivant dans ces cavernes pour échapper à la mort… Uniquement accessible par échelles de bambou, la promiscuité devait être le lot de chacun durant de nombreux mois, voire plusieurs années, les hommes sortant la nuit tombée pour trouver quelque nourriture…
Nous avons marché sous la chape ardente du soleil, arrosés de quelques coups de mousson. Promenade très agréable, éternellement baignée des sourires des personnes que nous croisons…
des noix séchant au soleil
Nous avons au retour changé de bungalow. Tarif trop cher pour la prestation ; Toilettes très sales refoulant une odeur d’égouts très forte, lavabo défoncé, moustiquaire trop petite et inefficace et comme c’est rarement habité en ce moment, ce n’est pas entretenu. Et j’ai croisé une araignée au soir, large comme une paume de main, gros corps plat, marron-gris, une espèce de monstre pas sympa…
Même si j’ai l’habitude d’en croiser en voyage, je déteste la gente arachnoïde, surtout de grosse taille !
L’araignée me voit, fait mine de s’enfuir, je m’arrête. Elle est prête à passer derrière la tête du lit. J’attrape ma sandale. J’ai une chance, une seule et je suis à 2 mètres. Il faut que la tong tombe avec force et à plat au bon endroit… Et… suspens… Bingo ! Je fais mouche… Ou bouillie d’araignée plutôt…
Sur l’autre rive de la Nam Ou, nous prenons un bungalow simple mais propre avec toilettes (à la turque), mais 3 $ seulement (Sunrise Guesthouse).
La douche s’effectue à même le sol, une grande bassine étant remplie d’eau froide, en s’aspergeant le corps avec un bol, méthode traditionnelle Lao et Thaï. C’est frais, çà vivifie après la chaleur.
Sinon l’alternative c’est d’aller se laver dans la rivière… Nombre de personnes se lavent ainsi ici…
Fin de journée passée sur la terrasse à apprécier le calme, devant la Nam Ou, et à écrire ces dernières lignes.
Notre partage de vie avec Cubi en voyage se passe très bien. Nous sommes emplis d’envies de découvertes et formons une bonne équipe.
19H15, il fait nuit noire et c’est bourré d’insectes attirés par la lumière. Il faut vite s’enduire de repellent (répulsif) pour ne pas être dévoré par les moustiques et porter également des vêtements longs.
Nous allons partir dîner dans une gargote locale, au bon gré de nos intuitions…
Demain, bateau……
A suivre…
Uxar
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11/10/06 Muang Ngoi Neua
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